Un projet de croisière fluviale sur la Loire


En début d’année, la Société CroisiEurope a lancé une campagne de presse concernant la mise en service, au printemps 2015, d’un navire, dont le nom serait “Loire princesse”, destiné à des croisières de 8 jours sur La Loire entre Nantes et Angers. Ce bateau, de 90 m de long sur 15 m de large et 3 ponts, pourra accueillir 96 passagers dans ses 48 cabines. Premier bateau de croisière à cabines sur la Loire, il est conçu par la société nantaise Stirling design international, accompagné par les bureaux d’études spécialisés Arco marine, Ship studio et Hydrocean. En raison des faibles profondeurs de la Loire, le navire a été conçu avec une propulsion par roues à aube.
Cette première campagne publicitaire présentait même le navire devant la mairie de?Saumur. Rien de moins !......
Depuis, la documentation a été épurée et est particulièrement significative car, en fait, ce n'est pas un bateau de croisière mais un hôtel flottant. En effet, tous les circuits touristiques se font en cars. La Loire est loin des préoccupations de CroisiEurope. Compte tenu des dimensions du projet : 90 m de long, 15 m de large, s'agit-il bien d'un bateau adapté à la Loire? L'utilisation de la technique des roues à aube, pour intéressante qu'elle soit, ne cache-t-elle pas des contraintes qui vont amener à des aménagements du fleuve, ce qui irait à l'encontre de ce qui est voulu pour la Loire depuis 20 ans et qui est confirmé par le futur Plan Loire?
Une navigation touristique de cette ampleur semble peu compatible avec le programme de reconquête morphologique du lit de la Loire en amont de Nantes.
On semble bien loin des termes du protocole signé entre l'Etat et V.N.F, à savoir l'adaptation des bateaux au fleuve et à son hydraulicité et non l'inverse.

A l’annonce de ce projet, l’association “Sauvegarde de la Loire angevine” a émis certaines réserves sur celui-ci.
La principale porte sur les caractéristiques du bateau en question. Sa longueur, sa largeur, ses tirants d’eau et d’air font émettre des doutes quant à sa possibilité de naviguer entre Nantes et Bouchemaine d’une façon régulière. En effet, le passage de certains hauts-fonds semble fortement problématique.
L’été, des difficultés de franchissements vont être significatives à plusieurs endroits (double seuil du Fresne, déplacement de bancs de sable, etc.) et, en moyenne saison, ce sont les ponts qui poseront des difficultés. De même, le choix de la roue à aubes semble avoir été fait pour prendre en compte "les contraintes naturelles" (Le Figaro Economie, 15 février 2014) alors que l'on peut se demander si les roues à aubes, en mettant en mouvement les granulats du fond du lit, ne vont pas à l’encontre des projets portés notamment par la Région Pays de la Loire et le Plan Loire Grandeur Nature pour rehausser la ligne d’eau d’étiage.

L’association n’est pas opposée à un développement du tourisme fluvial sur le fleuve, mais il doit prendre en compte un élément déterminant qui est la "nécessaire adaptation des bateaux au fleuve et à son hydraulicité et non l’inverse", conformément au protocole, en date du 2 avril 1997, signé entre l’Etat et VNF et comme l’évoque également le "Programme Régional d’actions concerté en faveur de la Loire et de son estuaire" de janvier 2013. La stratégie de reconquête géomorphologique du lit de la Loire, qui est d'intérêt général, ne saurait être remise en cause ou même hypothéquée.
Le projet de CroisiEurope est largement soumis aux aléas hydrauliques de la?Loire ce qui semble avoir été pris un peu légèrement en compte de même que la complexité de la navigation d’un navire d’une telle dimension. Si déboires économiques il y a pour des raisons climatiques et pour une mauvaise appréciation économique du projet, il ne faudrait pas entendre le sempiternel refrain “on a créé des emplois, aidez-nous car on va être obligé de licencier, etc....” ou encore “il faut aménager le lit de la Loire pour que l’on puisse naviguer, etc...”

Il faut que les choses soit claires, il ne peut être question d’aménager le lit de la Loire, comme ce fut le cas en 1988 en obturant le bras de La Guillemette pour un projet de navigation complètement utopique. Les études conduites depuis des années sur l’évolution morphologique du lit du fleuve et ses conséquences aboutissent à un programme de travail adopté par le Comité d’estuaire du 26 novembre 2013 et il ne saurait être question d’y déroger.

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