De l’intérêt des Plans de Protection des Risques inondation


Le Courrier de l'Ouest, dans son édition du 26 décembre 2012, s'est fait l'écho d'un vent de fronde que soufflaient des élus locaux sur le PPRi du Val d'Authion avec comme titre "l'effet Xynthia pénalise le Val d'Authion". Un article avait été déjà rédigé sur ce sujet dans la lettre d'information de décembre 2010 mais il apparaît nécessaire de refaire le point sur les PPRi dont la révision se profile pour les prochaines années.

Les PPRi
Le concept de Plan de Prévention des Risques naturels prévisibles (P.P.R.) date d’une loi de juillet 1987, rarement mise en application, et repris dans la loi de février 95.
Très succinctement, un P.P.R. a pour objet :
- de délimiter les zones exposées aux inondations et de définir, en fonction de la probabilité et de l’intensité des crues, les conditions d’occupation du sol,
- de définir les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises dans les zones concernées,
- de définir les mesures relatives, dans les zones concernées, à l’utilisation ou l’exploitation des constructions, ouvrages, etc.
Cela vaut naturellement pour des risques identifiés de tous types tels qu’avalanches, inondations, tremblement de terre, etc.
Dans nos régions inondables, les ancêtres des P.P.R. étaient les Plans de Surfaces Submersibles qui faisaient l’objet de décrets du 6 novembre 1958 définissant trois zones :
- zone de grand débit (zone rouge)
- zone complémentaire (zone jaune)
- zone inondable non réglementée (zone verte)
Seules les deux premières zones étaient soumises à réglementation.
Dès 1990, l’État et ses différents gouvernements, toutes tendances politiques confondues, ont considéré que les PSS étaient devenus inadaptés pour assurer une politique cohérente de protection des zones inondables et de ceux qui y vivent, compte tenu, en particulier, des fortes pressions d’urbanisme qui s’exercent dans ces régions.
C’est ainsi que sont nés, dans un premier temps, les atlas des zones inon-dables qui pour être des documents factuels d’informations n’en n’ont pas moins été l’objet de critiques habilement orchestrées, avant même qu’ils n’existent.
A partir de ces constats historiques, l’État a d’abord rédigé des Projets d’Intérêt Général (P.I.G.) puis, pour des unités géographiques cohérentes, des P.P.R.i
Après discussions, négociations, concertations, les P.P.R.i sont soumis, pour avis, aux communes concernées et sont soumis à enquête publique avant de faire l’objet d’un arrêté préfectoral d'approbation qui en fait un document valant servitude d'utilité publique, opposable.
A ce jour, pour le Maine-et-Loire, il
existe onze Plans de Prévention des Risques d'inondation.

Le PPRi du Val d'Authion
Le PPRi du Val d'Authion fut le premier à être réalisé en Maine-et-Loire et a fait l'objet d'un arrêté préfectoral en date du 29 novembre 2000, (simple coïncidence, le Val de Loire a été inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO le 30 novembre 2000…). Ce PPRi avait fait l’objet d’une longue négociation entre les services de l’Etat et les collectivités territoriales pour aboutir à un consensus, bien que le Ministère de l’Environnement le considérait un peu trop laxiste.
Six années plus tard, ce qui est bien peu pour un document de planification, sous la pression d’élus locaux, le préfet a accepté que soit procédé à quelques modifications de ce document réglementaire (arrêté préfectoral du 22 mai 2006)
Alors que le moment est venu, pour ce PPRi, d'être soumis à la révision, normalement décennale, prévue par les textes, vingt-sept communes sur les quarante concernées se sont unies en une "Association de défense des communes du Val d'Authion" pour rendre moins contraignant le futur PPRi. C'est le droit de tout un chacun de s'unir pour défendre des intérêts communs et il n'est pas contestable. Il convient cependant de rappeler quelques éléments fondamentaux à prendre en compte lors de l'élaboration ou de la révision d'un PPRi.
• un PPRi a pour but d'anticiper l'arrivée de catastrophes naturelles susceptibles de porter atteinte aux personnes et aux biens en édictant une réglementation concernant l'occupation des sols. Pour cela, il est fait référence aux plus hautes eaux connues (P.H.E.C.). Dans le cas du Val d'Authion, la mémoire de l'inondation de 1856 est perdue, bien qu'il existe de nombreux repères parfaitement identifiés, et la tentation est grande de considérer que ce qui est arrivé, n'arrivera plus.
• Le Val d'Authion a la particularité d'être isolé de la Loire par la Grande Levée qui est considérée comme une digue de protection or il est maintenant admis qu'une digue de protection met en danger ceux qui sont protégés si elle se rompt. Compte tenu de la hauteur de l'ouvrage par rapport au terrain naturel protégé et de l'importance de la population concernée, la Grande Levée est classée en catégorie A, la plus dangereuse. A ce titre, elle est soumise à une Etude de Dangers (E.D.D.) conformément au décret du 11 décembre 2007 dans le but d'identifier le niveau de risque de l'ouvrage et d'apporter des informations essentielles sur la sûreté de l'ouvrage et sur la sécurité des personnes exposées (voir lettre N° 52). Croire qu'il n'y aura plus jamais de surverses au-dessus d'une levée, voire de rupture, serait faire preuve de légèreté et le but de ces études de dangers est de faire en sorte de tout mettre en œuvre pour éviter ou limiter les conséquences d'une crue exceptionnelle.
• Il est fait souvent référence à la station d'exhaure des Ponts-de-Cé, construite en 1974 et dont les conséquences seraient qu'il n'y a plus d'inondation depuis cette date. Il convient de rappeler que le Val est concerné par deux types d'inondation. Celles provenant d'une rupture de la levée, comme en 1856 ou d'une surverse et celles provenant de pluies intenses sur le bassin versant de l'Authion et de la remontée de la nappe alluviale de la Loire. Avec un débit de l'ordre de 60 m3/s, la station d'exhaure est efficace pour ces dernières mais son rôle serait inexistant en cas de rupture de digue où les débits envahissant le val seraient de l'ordre du millier de m3/s.

Que réserve l'avenir
En ce début du 21ème siècle, la communauté scientifique est unanime, à l’exception de quelques sceptiques, pour considérer que nous sommes rentrés dans une phase de réchauffement climatique et l'absence actuelle de réduction significative de la production de CO2 conduit a des scénarios plus ou moins pessimistes. Les climatologues considèrent maintenant une augmentation de 3 à 4 °C pour la fin du siècle ce qui se traduirait par une augmentation du niveau de la surface des mers de 30 à 40 cm. Si tel est le cas, cela ne sera pas sans effet sur l'écoulement des crues dans l'estuaire des rivières.
Un consensus se dégage aussi pour estimer que cette élévation de la température moyenne entraînera des épisodes climatiques extrêmes tant en sécheresse qu'en pluviométrie avec, dans ce dernier cas, des risques d'inondations importantes.
Enfin, pour compléter ces hypothèses pessimistes à court terme (1 siècle) les inerties thermiques des océans laissent à penser que l'élévation de température continuera de progresser un certain temps, même si la production de CO2 diminue drastiquement. Triste Futur pour les générations à venir.

En terme de conclusion.
Si la tentation est grande d'assouplir la réglementation des PPRi, tout milite, au contraire, en faveur de la conservation de leur rigueur. Avons-nous le droit, en conscience, de raisonner dans le court terme alors que notre devoir est d'anticiper l'avenir avec tous les risques dont il est porteur. Il ne peut y avoir de bonne gestion des territoires, aussi bien de la part de l'Etat que des Collectivités territoriales, qu'en pensant à l'avenir, bien au dela de quelques dizaines d'années.

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